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THALIE, LIVRE III.

l’ensevelit sous des montagnes de sable, et la fit entièrement disparaître. Ainsi périt cette armée, au rapport des Ammoniens.

XXVII. Cambyse étant de retour à Memphis, le dieu Apis, que les Grecs appellent Épaphus[1], se manifesta aux Égyptiens. Dès qu’il se fut montré, ils se revêtirent de leurs plus riches habits, et firent de grandes réjouissances. Cambyse, témoin de ces fêtes, s’imaginant qu’ils se réjouissaient du mauvais succès de ses armes, fit venir devant lui les magistrats de Memphis. Quand ils furent en sa présence, il leur demanda pourquoi, n’ayant pas témoigné de joie la première fois qu’ils l’avaient vu dans leur ville, ils en faisaient tant paraître depuis son retour, et après qu’il avait perdu une partie de son armée. Ils lui dirent que leur dieu, qui était ordinairement très-longtemps sans se manifester, s’était montré depuis peu, et que lorsque cela arrivait tous les Égyptiens en témoignaient leur joie par des fêtes publiques.

Cambyse, les ayant entendus parler de la sorte, leur dit qu’ils déguisaient la vérité, et les condamna à mort, comme s’ils eussent cherché à lui en imposer.

XXVIII. Après les avoir fait mourir, il manda les prêtres, et, ayant aussi reçu d’eux la même réponse, il leur dit que si quelque dieu se montrait familièrement aux Égyptiens, il n’échapperait pas à sa connaissance. Là-dessus, il leur ordonna de lui amener Apis. Ils allèrent sur-le-champ le chercher.

Cet Apis, appelé aussi Épaphus, est un jeune bœuf, dont la mère ne peut en porter d’autre. Les Égyptiens disent qu’un éclair descend du ciel sur elle, et que de cet éclair elle conçoit le dieu Apis. Ce jeune bœuf, qu’on nomme Apis, se connaît à de certaines marques. Son poil est noir ; il porte sur le front une marque blanche et triangulaire, sur le dos la figure d’un aigle, sous la langue celle d’un escarbot, et les poils de sa queue sont doubles.

  1. Épaphus était le fils d’Io, fille d’Inachus. Les Grecs, qui rapportaient tout à eux, prétendaient qu’il était le même que le dieu Apis. Mais les Égyptiens rejetaient cela comme une fable, et disaient qu’Épaphus était postérieur à Apis de plusieurs centaines de siècles. (L.)