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HISTOIRE D’HÉRODOTE.

pays fort éloigné, et sort d’un grand lac, d’où il se jette dans un autre encore plus grand, qu’on appelle Mæotis, qui sépare les Scythes royaux des Sauromates. L’Hyrgis se décharge dans le Tanaïs.

LVIII. Tels sont les fleuves célèbres dont la Scythie a l’avantage d’être arrosée. L’herbe que produit ce pays est la meilleure pour le bétail, et la plus succulente que nous connaissions, comme on peut le remarquer en ouvrant les bestiaux qui s’en sont nourris. Les Scythes ont donc en abondance les choses les plus nécessaires à la vie.

LIX. Quant à leurs autres lois et coutumes, les voici telles qu’elles sont établies chez eux. Ils cherchent à se rendre propices principalement Vesta, ensuite Jupiter, et la Terre, qu’ils croient femme de Jupiter ; et, après ces trois divinités, Apollon, Vénus-Uranie, Hercule, Mars. Tous les Scythes reconnaissent ces divinités ; mais les Scythes royaux sacrifient aussi à Neptune. En langue scythe, Vesta s’appelle Tabiti ; Jupiter, Papæus, nom qui, à mon avis, lui convient parfaitement[1] ; la Terre, Apia ; Apollon, Œtosyros[2] ; Vénus-Uranie, Artimpasa ; Neptune, Thamimasadas. Ils élèvent des statues, des autels et des temples à Mars, et n’en élèvent qu’à lui seul.

LX. Les Scythes sacrifient de la même manière dans tous leurs lieux sacrés. Ces sacrifices se font ainsi : la victime est debout, les deux pieds de devant attachés avec une corde. Celui qui doit l’immoler se tient derrière, tire à lui le bout de la corde, et la fait tomber. Tandis qu’elle tombe, il invoque le dieu auquel il va la sacrifier. Il lui met ensuite une corde au cou, et serre la corde avec un bâton qu’il tourne. C’est ainsi qu’il l’étrangle, sans allumer

  1. Hérodote suppose que ce mot, chez les Scythes, signifiait père, et cela peut très-bien être. On sait que, dans toutes les langues, απ, πα, παπα, sont les premières syllabes que prononcent les enfants, et qu’ils désignent de cette manière leurs pères. (L.)
  2. Que signifie cette épithète que donnaient les Scythes à Apollon ? C’est ce qu’on ignore, et ce que l’on ignorera peut-être toujours. Hésychius fait venir ce mot du grec, tandis qu’il aurait fallu en chercher l’origine dans la langue des Scythes. M. Pelloutier n’a pas été plus heureux. Il dérive ce mot de goet syr, le bon astre. Il aurait fallu prouver que dans la langue de peuple syr signifiât astre. (L.)