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PAUL HAY DU CHASTELET

Tirsis ne voit-il pas que les tygres naissans
Autant que les agneaux paroissent innocens ?
De tous commencemens la douceur est si grande
Qu’il faut qu’à leurs attraits un jeune homme se rende…

Mais bientôt, emporté par les sens,

 des voluptez complices
Il suit l’ambition, le luxe et les délices ;
Il suit de la raison les cruels ennemis,
Serpens qui font mourir les hommes endormis.

Voilà encore un vers à retenir : et j’en pourrais citer beaucoup d’autres parmi les deux cent quatre-vingts qui composent cette satire. Le tableau de la vieillesse misérable de l’homme vicieux est particulièrement énergique :

L’impuissante chaleur du feu qu’il a nourry
Croist et ne paroist plus dedans ce bois pourry.
Il se trouve accablé de foiblesse et d’années ;
Il voit ses actions et ses mœurs condamnées ;
Il voit sa lâcheté qui souffrit que ses sens
Sur sa propre raison devinssent tout puissans :
Il est sans gouvernail, sans rames et sans voiles :
Des nuages épais lui cachent les étoiles :
Il est ensevely d’une telle vigueur
Qu’il ne voit plus le ciel que des yeux de la peur…

Il pense aux anciennes joies, aux anciennes maîtresses :

Sa vieille passion de misère suivie
L’attaque bien souvent de quelque souvenir.
Mais le temps écoulé ne peut plus revenir.

Lorsque l’on compare cette poésie mâle et franche