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L’ABBÉ DE FRANCHEVILLE


Mais vous estes bien au-dessus
Des amusemens superflus :
Vous allez tout droit au solide,
Et croyez, malgré vos appas,
Qu’un homme dont la bourse est vide
Sans doute ne vous aime pas.

Vous n’estes point dupe en douceurs,
On a beau vous dire : Je meurs,
Beaux yeux, du mal que vous me faites ;
Vous n’avez jamais sceu, pourtant,
Quand on vous a dit ces fleurettes,
Les prendre pour argent comptant.

Quand devant vous un triste amant
Plaint sa misère et son tourment,
Hélas ! le pauvret a beau dire,
Vous croyez qu’il est indigent,
Et que le mal dont il soupire
Est celuy d’être sans argent.

Me demander dix mille francs !
Un faiseur de vers en mille ans
Pourroit-il gagner telles sommes ?
Aujourd’huy qu’on ne donne pas,
Tant est fin le siècle où nous sommes,
Pour une ode quatre ducats.

Ô ! combien d’odes il faudroit,
Combien, soit à tort, soit à droit,
Il faudroit fabriquer de stances,
Avant que tel prix fût compté !
Mais, avec bien moins de dépenses,
Je donne l’immortalité.

Laissez là ces dix mille francs,
Je feray vivre dix mille ans