Page:Hamel - Titien, Laurens.djvu/28

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les yeux baissés, une palme à la main ; entre elle et le groupe principal se modèle puissamment sur le fond clair la belle figure populaire de saint Jean-Baptiste ; à gauche, des cimes légères d’arbres baignent dans l’atmosphère fluide.

La grâce est déjà plus libre et la composition mieux liée dans une Sainte Famille, de la National Gallery ; le paysage y joue aussi un plus grand rôle. La Vierge voilée de blanc, qui soutient à deux mains l’Enfant sur la crèche d’osier est délicate et blonde comme une figure de Palma.

La Vierge au parapet du Musée de Vienne, que l’on appelle aussi la Vierge bohémienne, en raison de son type basané, affirme un progrès plus décisif encore. C’est comme une prise de possession de la nature ; la plénitude des reliefs et la vigueur des tons font penser à Giorgione ; mais la beauté plus parfaite, le choix plus exquis, l’émotion plus tendre annoncent une force plus contenue et dirigée par un art supérieur.

Cependant le chef-d’œuvre de cette première période qui se caractérise par une grâce jeune et pure, n’est pas un tableau religieux ; c’est la toile fameuse de la Galerie Borghèse, l’Amour sacré et l’Amour profane. Peu d’œuvres reflètent mieux l’esprit d’une époque, la poésie élégante et voluptueuse de la Renaissance, et ce symbolisme délicat mais un peu obscur où se complaisait le goût des humanistes. Dans un noble paysage, à gauche escarpé et descendant à droite en terrasses étagées jusqu’à