Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/134

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approchait, et le bouton de la porte tourna : en vain ; il tourna une seconde fois, avec plus de force.

— Cachottier, dit la voix.

Puis, les pas légers s’éloignèrent dans le corridor, et se perdirent.

Georges conserva la clef du meuble, et Jeanne l’en railla.

Il s’excusait : « Ne croyez pas que j’agisse de la sorte pour le malin plaisir de vous taquiner ; certaines choses ne sont pas faites pour les femmes ; ce qui est sans danger pour nous devient périlleux pour des imaginations trop sensibles. »

Puis, il moralisa : à quoi bon connaître le mal ? La sensualité n’est que la consolation de ceux qui n’ont pas d’amour, et le vide qu’elle laisse est plus terrible que celui qu’elle a voulu combler.

Merizette écoutait avec une bienveillance docile, un peu narquoise ; elle lui demandait s’il avait toujours pensé ainsi.

Ces conversations la chatouillaient par leur côté scabreux ; elle s’enchantait aussi de cette aventure, parce que Georges y avait donné un encourageant témoignage de sa faiblesse. Il n’avait rien dit, rien fait ; il pactisait donc avec sa conscience, et se tenait pour satisfait par une demi-mesure de prudence. Jeanne, avec son flair féminin, plus qu’avec sa logique, avait déjà deviné en lui une nature passive malgré l’orgueil, et soumise aux influences autant que révoltée aux ordres ; ce dernier événement la