Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/211

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où s’engouffre, chez les êtres nerveux, le dernier reste de raison.

Jamais femme ne fut plus près de se donner ou de s’offrir : la conscience qu’elle n’avait point d’amour ne l’intéressait même plus ; elle se tourna vers Georges, et resta stupéfaite, en apercevant au détour du sentier une femme qui marchait vers eux.

— Bonjour ! cria la sous-préfète : ai-je forcé la consigne ? J’ai vu le comte, su de lui que je vous verrais au château, et me voici !

Fraîche et gaie, la Parisienne leur tendit les deux mains. Desreynes l’adora comme un messie ; Mme  d’Arsemar, malgré sa politesse, la regardait d’un œil mauvais.

— Que je suis ravie de vous rencontrer chez vous ! Je vais donc passer une après-midi qui me dédommagera des autres.

Au fond, elle croyait troubler une entrevue galante, un adieu d’amour, et se réjouissait d’être maudite. Elle fut surprise de l’accueil empressé de Desreynes, et en garda reconnaissance.

« Le pauvre homme en a déjà assez, de sa Lyonnaise… La petite fait une autre tête. »

— Est-il vrai que vous partiez demain, monsieur ? Combien je vous envie de rentrer dans mon cher Paris ! Moi qui voulais vous prier d’assister à une dernière sauterie que nous offrons après-demain. Ce sera moins royal que chez vous, chère comtesse, mais si vous y venez, vous m’aurez donné le plus beau de votre fête.