Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/236

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voyait si pleins de captivantes péripéties, que le danger en disparaissait sous le plaisir. Sans nul doute, elle avait dépensé, la veille, en résolutions de vertu, toute la vertu qu’elle possédait.

Puis, son personnage de cette heure était d’une date trop récente, d’une séduction trop inconnue, pour qu’il fût permis d’en voir les côtés chagrinants : dès qu’ils se présentaient à son esprit, elle les écartait avec une bonne foi tranquille, afin de revenir aux attrayantes rêveries qui l’enchantaient.

Et dans son cœur de femme aussi, dans sa chair et son sexe, un secret palpitait délicieusement : l’émotion d’un mystère dévoilé, une révélation suave, une surprise d’être qui se performe, un sacre, le paradis… Enfin ! Elle se sentait rougir en y pensant, et y pensait à toutes minutes. Comment se repentir ? L’égoïsme peut-il se refuser un pardon, quand il pardonnerait à toute la terre ? Pandore n’eût pas su pleurer sur sa faute, si elle n’eût trouvé, dans le coffret ouvert, que le plus beau présent d’un dieu.

L’adultère ! C’est donc un brevet de femme ? Ce mot jetait maintenant à son oreille une sonorité cabalistique ; les syllabes en vibraient comme des gongs de bronze sous des marteaux d’acier, à la porte d’un temple ; elles s’écrivaient sur les murs en larges traits de feu, qui flambaient avec une fascination d’enfer. Il lui semblait s’être initiée tantôt à une religion fermée, qu’elle avait jusque-là méconnue. Elle ne comprenait plus ses répulsions anciennes.