Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/261

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sur l’inquiétude finie et le contentement épuisé, elle chercha ce qui lui restait, elle ne conçut plus rien que le vide et l’ennui.

Le drame était joué, le livre était fermé, la vie redescendait son cours banal. La monotonie des jours sans émotions ni luttes lui parut plus insupportable encore, après les coups d’orage sous lesquels avait palpité sa nature anxieuse. L’existence de tous allait redevenir la sienne ; cette égalité pesait à son orgueil comme le calme à son humeur. L’automne viendrait froidir tantôt ; puis, dans la maison close, les livres seuls lui parleraient encore, sans pouvoir lui faire oublier que son printemps de jeunesse, de sève et de beauté s’alanguissait près d’un foyer d’hiver.

Elle chercha un remède à tant de maux. Quitter le Merizet pour Paris ? Pierre ne le pouvait pas. Retenir Georges ? Il ne consentirait pas. Il fallait se soumettre.

Alors, elle fut bien triste.

Céder au destin, c’est moins dur que de céder aux hommes : mais celle qui se sentait créée pour la pourpre des trônes, et qui, le sceptre en main, eût pleuré d’impuissance si la mer lui eût résisté, celle-là pouvait-elle s’incliner sans rage devant la nécessité d’un mesquin empêchement ?

— Oh ! Je m’ennuie déjà.

Suivre son amant, c’était drôle, mais fou : ne la repousserait-il pas ? Parbleu, elle le tuerait pour l’injure ! Des drames se dessinaient dans son cerveau : elle s’en effrayait à plaisir.