Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/268

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médisance bavera son venin ! Pauvres gueux si dépourvus de foi et d’amour, qui trouvent en eux une âme pour de telles ignominies ! Être assez vil pour concevoir cette chose et assez lâche pour l’écrire ! Sois solitaire, exile-toi dans ton bonheur, ferme ta vie, et l’on passera sous ta porte ; oublie le monde, le monde ne t’oublie pas… Infâmes !

Il repoussa avec dégoût un papier anonyme, et, lentement, il se promenait dans sa chambre : au premier cri d’indignation avaient succédé la tristesse et la pitié.

Jeanne et Georges !

Eux, accusés ! Il songea d’abord à les laisser tous deux ignorants du soupçon qu’on prétendait dresser sur leur conduite ; mais il estima que son devoir serait d’informer Desreynes, et cette décision le rasséréna.

Il prit la lettre et descendit.

— Connais-tu Bazile et la province ? Tiens, lis ça !

Dès la seconde ligne, Georges avait deviné : la feuille remuait entre ses doigts et les mots dansaient sur la page.

« Monsieur,

« Veuillez croire que ma haute estime et ma sympathie seules me font une douloureuse obligation de vous déclarer ce qui, malheureusement, n’est plus ici un mystère pour personne, et dont tous les honnêtes gens sont chagrinés pour vous.