Page:Haraucourt - Amis, 1887.djvu/409

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lui rendre, sinon la sérénité, du moins la raison qui pèse la vie.

Desreynes était à son côté : cette persistante surveillance qui l’avait offusqué tantôt le toucha maintenant. Malgré tout, on l’aimait. Encore une fois il eut honte et remords. Quel chagrin ne léguerait-il pas au frère abandonné ?

L’âme s’épure, devant la tombe qui s’entrouvre.

Il ne s’agissait pas de sa mort, mais de la leur.

— Ce qu’il a fait par égarement, je le ferais par volonté !

Le survivant survivrait peu, et telle était encore la meilleure espérance qu’il pût se permettre en partant, car le trépas serait, pour cet autre damné, le seul refuge, le seul accueil, le seul oubli.

— Ma vie m’appartient, mais, la sienne ?

Déjà les côtes ne formaient plus à l’horizon qu’une bande inégale et d’un bleu épais : au-dessus flambait le phare du Vésuve.

La mer les berçait toujours,

Arsemar, de plus en plus, se rendait à l’impossibilité du double meurtre ; il avait trop peu de vanité pour songer que le suicide est lâche ; mais il avait trop de bonté naïve pour ne pas se convaincre que ce suicide serait un crime.

— Nous vivrons.

Hélas ! Cette tranquillité relative qu’avait donnée la mort prochaine s’évanouit avec le droit de mourir ; la conscience du devoir accompli en voulut rendre une