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LE SOIR.

Si ton âme embrumée, ô fille d’Ossian,
Par un dégoût dont rien ne doit plus la distraire
S’est prise pour la mort d’un culte patient :
Pourquoi donc as-tu peur de moi ? Je suis ton frère !


Hymen, Hymenæé ! C’est l’heure des baisers…
Viens-nous-en : les corbeaux croassent sur les tombes.
Hymen ! Et que l’autel ressemble aux épousés !
Hymen ! Et que le nid soit digne des colombes !

 
Au fond des nuits ! Je sais un grand bois où l’hiver
Suspend des fruits de glace autour des fleurs de givre,
Un bois désespéré, paradis de l’enfer,
Où noir, nu, chaque tronc dort crispé comme un guivre.


Nous nous en irons loin, très loin, tous deux, tout seuls,
Nous accoupler sans bruit sous les cieux sans étoiles :
La neige déploiera ses tranquilles linceuls
Pour mettre à notre lit des draps blancs et des voiles.