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pus alors envisager en détail la situation. Les types, à la fois singuliers et sympathiques de mes compagnes, et le plan du vaste galetas qui leur servait d’encadrement, mériteraient la vigueur de touche d’un autre pinceau que le mien, mais tel qu’il me frappa, je vais essayer de le peindre.

Rectangulaire, le Grenier était divisé, au centre d’abord et dans toute la longueur, par une sorte de sentier dont le pied des paillasses formait comme les talus latéraux. Douze portes-fenêtres mobiles, vitrées de haut en bas, y répandaient le jour que voulaient bien laisser passer d’énormes jalousies fixes. Cependant, si massives qu’elles fussent, elles permettaient de voir au dehors sans être vu. La nécessité rend ingénieux. Leurs ais étagés avaient été transformés en dressoirs pour la vaisselle.

Des poteaux, distants entre eux d’environ six mètres, divisaient en sections le Grenier. À ces poteaux, des cordes tendues, sur lesquelles toute la friperie multicolore des pauvres prisonnières étalait sa vétusté désolante. C’était dans une certaine mesure le seul paravent qu’on put opposer aux regards effrontés des gardiens, car celles d’entre nous qui disposaient d’un châle ou d’un