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introduction

Les Mages qui ont fourni aux Grecs tous les renseignements que ceux-ci possédèrent sur Zoroastre, avaient tout intérêt à reculer son époque de nombreux siècles et ils n’ont point manqué de le faire. Des variations devaient nécessairement se produire dans des calculs de fantaisie. Les Parses, du reste, sont très sobres de chiffres et font vivre Zoroastre peu avant Cyrus.
Les fables qui composent la vie traditionnelle du prophète mazdéen ne prouvent pas plus que celles dont Mahomet a embelli son autobiographie ou que ses disciples ont inventées à la même fin. Nous savons par Hérodote que les Perses, cent ans à peine après la mort de Cyrus, avaient déjà rempli son histoire de récits merveilleux. Est-il étonnant que les Mages aient voulu transformer leur sage principal en un thaumaturge ? On verra, du reste, que la plupart des légendes zoroastriennes n’ont été créées qu’au moyen-âge et que I’Avesta n’en connait que peu de choses.
On objecte encore que la religion mazdéenne n’a pu être l’œuvre d’un homme, et qu’elle suppose un travail de plusieurs siècles. Mais on remarquera aisément que l’objection porte à faux. Personne ne regarde Zoroastre comme l’auteur du système avestique dans son entier ; on ne lui attribue d’autre rôle que celui de Mahomet. Il est incontestable qu’une transformation s’est opérée dans les croyances éraniennes quelques siècles avant l’ère moderne. Cette transformation n’a pu se produire spontanément, ni inconsciemment. L’initiative a dû appartenir à un penseur quelconque. Cette initiative a pu s’exercer d’abord sur un corps sacerdotal qui a propagé le mouvement ou elle a pu être prise par un seul individu qui a fait triompher le nouveau système par l’influence de sa puissante personnalité. L’histoire nous montre presque tous les systèmes religieux et philosophiques naissant et se développant sous l’action d’un homme.
N’est-il point à présumer que les mêmes lois régissent les mêmes faits, et à quelqu’époque qu’ils appartiennent, lorsqu’aucune raison ne permet de supposer une différence ? L’exemple du brahmanisme n’est point ici applicable. Le brahmanisme n’est pas un système mais une collection des théories les plus opposées, depuis la foi révélée jusqu’à l’athéisme.
Il résulte de ce court examen que la question doit rester indécise, les éléments de solution manquant complètement, et que les solutions adoptées dépendent plutôt des tendances individuelles que des raisonnements. On verra plus loin les raisons qui nous font pencher vers l’une plutôt que vers l’autre. Pour le moment prenons le personnage de Zoroastre tel que les auteurs anciens nous le font connaitre et voyons le rôle qu’il joue dans l’Avesta et dans les croyances avestiques.
On ne s’étonnera point que l’antiquité et le moyen-âge nous aient laissé sur le prophète mazdéen des témoignages contradictoires.
Ces incertitudes, ces contradictions se produisent naturellement dans la transmission de faits antérieurs à toute histoire ; les traditions populaires, qui se transmettent de bouche en bouche, vont nécessairement s’altérant d’âge en âge et finissent maintes fois par devenir méconnaissables. La race aryaque asiatique est peut-être de toute la famille, celle chez qui le génie de l’histoire fait le plus défaut. Le livre des Rois (Shah Nâmeh), le poème légendaire de Firdousi, est encore le principal ouvrage