Page:Harvey - La Circulation du sang, trad. Richet, 1879.djvu/192

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Ces mots nous montrent clairement pourquoi cet homme illustre admet en partie la circulation du sang et la rejette en partie, et pourquoi il s’est arrêté à une théorie indécise et hésitante sur la circulation du sang. Or il ne détruirait pas la vieille médecine, si, conduit par l’amour de la vérité et non par la crainte, il osait dire hautement son avis, ce qu’il ne fait pas, de peur de porter atteinte à la médecine antique et traditionnelle, et de paraître contredire la physiologie qu’il a exposée lui-même dans son Anthropologie. En effet, la circulation du sang ne détruit pas la vieille médecine, mais la soutient au contraire, en établissant la physiologie médicale sur l’observation des phénomènes naturels et en combattant les théories anatomiques de l’usage et des fonctions du cœur, des poumons et des autres viscères. Ainsi donc on verra facilement, tant par ses paroles mêmes et ses aveux que par les raisons que je vais donner, que le sang tout entier, en quelque partie du corps qu’il se trouve, se meut et change de place, aussi bien le sang des grosses veines et de leurs ramifications que celui qui est contenu dans les porosités de toutes les parties, que ce sang, dis-je, vient du cœur et qu’il reflue au cœur d’une manière continue. Nulle part il ne reste stagnant sans éprouver des altérations, et cependant j’accorde qu’en certains endroits son cours est plus rapide ou plus lent.

Aussi ce savant auteur se contente de dire d’abord que le sang des ramifications de la veine porte ne peut pas y circuler : or il n’aurait pu combattre ce fait ou le nier, s’il ne s’était caché à lui-même la force de son argumentation (liv. III, chap. vii). « Que si, dit-il, le cœur reçoit, à chaque pulsation, une goutte de sang et la lance dans l’aorte, comme, en une heure, il a deux