Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/107

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délicate et souple, avec un petit poignet qui semblait ouvré par un artiste, et, quand elle portait son verre à la bouche, elle ressemblait à Greuze envoyant un baiser à la vie. Elle avait des flammes fauves plein les cheveux et ses cils, vus à la clarté crépusculaire, brillaient comme des tissus d’or. Un parfum à peine perceptible montait de sa chair. Marcel la regardait avec une tendresse apaisée. Félix, les observant, se rappelait la confidence de son ami, et, pour la première fois, il fut frappé de la complète dissemblance physique de ces deux êtres. Dans une même famille, les frères et les sœurs, quelle que soit leur disparité de traits et de tempéraments, ont des signes distinctifs et communs qui trahissent leur étroite consanguinité. Leur visage a des reflets qui sont ceux de vies portées dans le même sein. Un bon observateur ne s’y trompe jamais.

En face de ses hôtes, la physionomie de Félix était déroutée ; mais il ne chercha pas à s’expliquer le phénomène qu’il constatait et auquel il n’attachait aucune importance. Seulement, il trouva, dans la complète dissemblance de Claire et de Marcel le mot de l’énigme : ils n’ont ni une même chair, ni un même sang, ni une même âme, il est donc possible