Page:Harvey - Marcel Faure, roman, 1922.djvu/76

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s’employer ensemble à fortifier ce groupe, sous peine de mort. Notre espèce est essentiellement sociable.

« Au-dessus de tout, la patrie ! Ah ! ce qu’on a gâché notre éducation nationale ! La patrie est absente de nos écoles. Parce que nous avons manqué de professeurs de patriotisme, nous avons eu une race de fronts penchés portant sur ses épaules cent cinquante ans de colonialisme ramollissant. Les tribus et les harangueurs de Saint-Jean-Baptiste se sont en vain morfondus en clichés rances et en pâmoisons déclamatoires pour nous donner l’illusion d’une patrie aimée, préférée entre toutes et pouvant escompter, au besoin, le sacrifice du cœur et du sang de ses enfants. Leurs outres ont crevé sur des crânes durcis, parce que la petite école n’avait pas ménagé, dans le cerveau des tout jeunes, un lieu saint, un sanctuaire où l’âme se serait agenouillée devant les vénérables reliques du passé et devant l’idée rayonnante de la Patrie.

« Dans mon école, nous ne cessons de dire à nos petits : « Rappelez-vous que vous n’êtes ni des Français ni des Anglais : vous êtes des Canadiens. Vous n’avez qu’une patrie : le Canada. Vous n’avez qu’un seul intérêt national : l’intérêt du Canada. La terre où vous