Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 1.djvu/426

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
Oronte

Fi !

M. Michaut

Fi !Dépend-il de nous d’être de qualité ?
Quand on m’a voulu faire, ai-je été consulté ?
Sans savoir ce qu’il fait le hasard nous fait naître
Et ne demande point ce que nous voulons être.
Mon père fut d’un rang plus noble que le sien :
Il se fit médecin, gagna beaucoup de bien,
N’eut que moi seul d’enfant, et, passant mon attente,
Me laissa par sa mort cinq mille écus de rente.
Comme Paris est grand, j’ai changé de quartier ;
Je me fais par mes gens appeler chevalier ;
La maison que j’occupe a beaucoup d’apparence,
Et personne à présent ne sait plus ma naissance.
Faites-moi gentilhomme, il n’est rien plus aisé…
… Greffez-moi sur quelque vieille tige,
Cherchez quelque maison dont le nom soit péri ;
Ajoutez une branche à quelque arbre pourri…

Oronte

Votre nom n’est pas noble assurément.

M. Michaut

Votre nom n’est pas noble assurément.Qu’importe ?…
Croyez-vous qu’à la cour chacun ait son vrai nom.
De tant de grands seigneurs dont le mérite brille,
Combien ont abjuré le nom de leur famille !
Si les morts revenaient, ou d’en haut ou d’en bas,
Les pères et les fils ne se connaîtraient pas…
Je n’escroquerai point vos soins ni vos paroles :
J’ai certain diamant de quatre-vingts pistoles…

Oronte

Je vous l’ai déjà dit, Monsieur, aucun appas
Ne me fera jamais dire ce qui n’est pas.