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ton, quelques sarcasmes, quelques anecdotes qui traînent les rues, beaucoup d’injures, et un style souvent barbare. »

Les Mémoires secrets ne jugent pas plus favorablement l’œuvre de Méricourt : « On sent que cet ouvrage pourrait être très-bon s’il était pris et suivi dans son vrai point de vue ; mais celui-ci n’est qu’une rapsodie, une compilation de beaucoup de choses anciennes. Ce qu’on y trouve de mieux, c’est une grande hardiesse à s’expliquer sur le compte des histrions, sacrilége littéraire dont ceux-ci se plaignent hautement, et qui pourra bien mériter au critique la suppression de son journal. »

Et c’est en effet ce qui arriva. Les comédiens d’alors avaient l’épiderme autrement sensible que ceux d’aujourd’hui ; Le Fuel en fit la dure expérience, et finit par succomber dans cette lutte, dont les Mémoires secrets retracent toutes les péripéties.

Le journal ne tombant pas assez vite, on eut recours aux grands moyens : on profita d’une maladie du propriétaire pour l’en dépouiller.


13 décembre. Le sieur Le Fuel de Méricourt n’est pas mort ; il semble même échappé au danger qui le menaçait ; mais son journal l’est véritablement. Les comédiens et leurs partisans ont si bien manœuvré qu’on lui a substitué pour faire cet ouvrage un commis des fermes nommé Le Vacher. On dit que c’est un suppôt du sieur de La Harpe, qui sera en outre aux gages des comédiens pour les encenser à outrance. Il ne manquera pas de lecteurs assez benins pour lire une pareille rapsodie.