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à 300,000 livres ; alors il serait venu, disait-il, les manger paisiblement à Paris. Mais son inaction de quatre mois et les voyages qu’il a été obligé de faire lui ont écorné considérablement son petit trésor, en sorte qu’il faut recommencer sur nouveaux frais. Au reste, il aurait les 300,000 livres qu’il désire, et un million, qu’on ne croit pas que son caractère turbulent lui permît de goûter la vie qu’il a en perspective : il sera toujours le premier à troubler son repos ; et, comme le lui a dit un de ses confrères, le plus cruel ennemi qu’il ait, c’est lui-même. »

C’est de Voltaire qu’était partie cette qualification d’Arétin moderne ; et, si elle était cruelle, elle était juste en de certaines applications. Oui, dit M. Monselet, il y a quelque chose du fléau des rois dans la vanité exigeante de Linguet, dans son âpreté à la polémique, dans sa versatilité impudente. Comme Arétin, il se jette à travers tous les événements, il s’impose dans les grandes questions. Lui-même a défini son caractère par ces trois mots : opiniâtre, inflammable, inflexible, et le succès prodigieux de ses Annales est dû surtout aux sarcasmes dont elles sont remplies, aux hardiesses de tout genre qu’il s’y est permises.


En quittant l’Angleterre, Linguet tourna ses pas vers la Suisse ; mais il ne put prendre pied ni à