Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 3.djvu/376

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Né dans une république, il avait pris en aversion les contrariétés auxquelles la liberté individuelle y est trop souvent exposée, et la monarchie régulière, appuyée sur les lois et sur l’autorité d’une aristocratie tempérée, lui paraissait le gouvernement le plus désirable : il le défendit avec une constance et une fermeté qui ne se sont jamais démenties.

Son passage au Journal historique et politique fut marqué par un acte de courage qui lui fait trop d’honneur pour que nous ne le consignions pas ici. Lors des troubles de Hollande, suivis, en 1787, de l’invasion de ce pays par les Prussiens, le ministère français se montra disposé à soutenir le parti patriote contre la maison d’Orange. Mallet fit, pour son journal, un article où il se déclarait hautement contre le ministère, et démontrait le danger de favoriser l’insurrection. M. de Vergennes, à la censure de qui le travail de Mallet était subordonné, arrêta l’article, en fit rédiger un tout contraire, et le lui envoya, avec injonction de l’insérer. Mallet court aussitôt à Versailles, va trouver le ministre : « Monsieur le comte, lui dit-il, l’injonction que j’ai reçue de vous est, en d’autres termes, l’ordre de vous rapporter le privilége que je tiens de votre bienveillance ; le voici : je n’écris point contre ma conscience. » Frappé de cette résolution, M. de Vergennes saisit les mains de Mallet, en lui disant « Je ne reprends point ce que j’ai si bien placé. Je sacrifierai mon