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blic qui commençait à l’oublier[1]. Il a fait beaucoup mieux encore, car il vient d’obtenir — et ce pourrait bien être une autre énigme — la permission de sortir de la Bastille, même celle de continuer son journal. On lui interdit à la vérité toutes les matières de religion, de gouvernement et de politique ; mais on lui abandonne, dit-on, pour ses menus plaisirs, les philosophes et l’Académie. »

Rendu à la liberté dans les premiers mois de 1782 — ou plutôt sorti de la Bastille, car, quoi qu’en dise Grimm, on ne lui ouvrait les portes de cette prison que pour lui en donner une autre en l’internant à Rethel, — il s’enfuit à Bruxelles ; puis, ne s’y croyant pas suffisamment en sûreté, il repassa la mer, pour « mettre entre les largesses du ministère de France et lui une distance qu’elles ne franchiraient pas. » Arrivé à Londres, il n’est pas encore rassuré ; il se retranche dans une maison quatre fois

  1. On lit à ce sujet dans les Mémoires secrets : « Voilà Linguet installé de nouveau dans la carrière où ses travaux avaient été si désagréablement interrompus ; il est douteux qu’il puisse y rapprocher la fortune de la prudence. Son projet prétendu d’une communication facile entre deux endroits très-éloignés paraît n’être que le rêve de quelque plaisant désœuvré. Il en est résulté, comme de la plupart des imaginations chimériques, quelque chose d’utile. C’est une invention qui n’est pas neuve, et ne remplirait qu’imparfaitement le même objet, mais dont on pourrait cependant tirer quelque parti. Il s’agit d’établir sous terre des conducteurs électriques en fil de fer doré, renfermés dans des tuyaux garnis de résine. Une machine électrique à l’une des extrémités de ces conducteurs, et des lettres de métal, des caractères tachygraphiques, à l’autre, rendraient cet appareil très-propre à transmettre d’un lieu à un autre, même à une distance assez considérable, des avis fort détaillés. Les physiciens et les amateurs de l’électricité connaissent les moyens de mettre en pratique d’une manière assez sûre ce procédé simple et peu coûteux, eu égard aux avantages qu’il promet. » (T. xiii, p. 84 ; 5 juin 1782.) On voit que l’idée du télégraphe électrique n’est pas tout à fait nouvelle.