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qui est juste, ni plus rien de nuisible que ce qui est criminel de sa propre nature.

Nous nous appliquerons donc à lui rappeler quelle est l’étendue de ses droits et quelle est la règle de ses devoirs. Nous lui ferons voir que ses droits consistent dans la sûreté de sa personne, dans la liberté de ses actions, dans la propriété de ses biens. Nous lui montrerons que ses devoirs consistent à respecter ce triple droit dans les autres. Enfin nous lui prouverons que les gouvernements ne peuvent avoir été institués que pour lui garantir ces trois branches du droit naturel.

Il verra dans le développement de cette grande vérité quelle est l’essence de l’autorité souveraine, quelle est l’étendue de ses devoirs et quelles sont les bornes de son pouvoir. Il verra que notre doctrine à cet égard n’est qu’une application du droit naturel fondée sur l’évidence même…

Pour procéder avec ordre, nous mettrons à la tête de ce journal un précis raisonné du droit naturel. Au moyen de ces notions préliminaires, un lecteur exercé saura déjà à quoi s’en tenir sur la plupart des objets qui intéressent la société. Il verra ce qui constitue le crime et la vertu ; il démêlera les établissements utiles et nuisibles ; il ne confondra point la tyrannie avec l’autorité légitime ; il discernera les lois fondées sur la justice d’avec les règlements arbitraires… En un mot, il n’ignorera rien de ce qui peut contribuer au bonheur ou au malheur d’une nation.

Cependant cette théorie simple et sans application ne suffirait pas au triomphe de la vérité. Elle a deux ennemis trop puissants à combattre : le préjugé des peuples et l’intérêt des despotes. On ne doit point se flatter de surmonter aisément de tels obstacles.

Les hommes sont si peu familiarisés avec les idées morales, les préjugés concernant la politique sont si généralement répandus, les racines qu’ils ont jetées dans les esprits sont si profondes, les ténèbres de l’ignorance à cet égard sont si épaisses, qu’il n’est pas vraisemblable que l’évidence même, avec tout l’éclat de son flambeau, puisse d’abord en dissiper l’obscurité.