Page:Hauvette - Littérature italienne.djvu/569

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du jugement, au sentiment profond qu’il avait de la beauté d’une oeuvre, d’une page, d’un vers, il joignait un rare talent d’écrivain, dont la fraicheur d’impression et d’expression semblait créer une beauté nouvelle. Nul plus que lui n’a contribué a répandre parmi les Italiens de sa génération l’idée que la critique peut devenir à son tour une oeuvre d’art. Dans son << Examen de conscience d’un lettré’» (publié en 1916), il analysait, de la façon la plus pénétrante le conflit entre partisans de la neutralité et partisans de l’entrée en guerre, qui, du mois d’aout 1911- au mois d’avril 1915, agita si profondément les esprits ; et Serra concluait, sur le mode épique: << On a dit que l’Italie, meme si elle perd l’occasion qui s’offre à elle, pourra la retrouver ; elle réparera. Mais nous, comment réparerons—nous ? Nous vieillirons dans la faillite. Nous serons ceux qui ont manqué leur destinée! » Son contemporain Giovanni Boine, né en Ligurie, mort phtisique (1887-1917), fut surtout un idéaliste en proie aux tourments de la pensée, dans le domaine religieux et philosophique. Il a laissé un court roman auto-biographique, Il Peccato (1914), qui mériterait de ne pas tomber dans l’oubli. Ses Plausi e botte (<<Applaudissements et coups de poings », publiés en 1928) sont un curieux témoignage de l'âpreté des querelles littéraires à la veille de la guerre.

Un romancier de réel talent, fruste mais fort, est le siennois Federico Tozzi (1883-1920), exemple assez rare d’un écrivain qui s’est voué at la carriére des lettres sans culture préalable. Fils d’un paysan de la Maremme venu se fixer à Sienne, ou il avait ouvert un petit restaurant, Tozzi, doué d’un tempéramentindocile, ne fit pas d’études régulières ; il devint employé des chemins de fer, et, quand il hérita de son pére, incapable de diriger l’ << os-