Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/117

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les poules n’avaient pas pondu la veille. Celle-ci alla s’en assurer, mais revint peu après, les mains vides ; heureusement, la conque du marchand de marée annonça, précisément alors, qu’il allait bientôt traverser la rue. Frappant énergiquement aux carreaux de la fenêtre, Hepzibah lui fit signe d’entrer et lui acheta le plus beau poisson qu’il eût dans sa charrette. Phœbé fut ensuite requise de faire griller un peu de café, lequel, au dire de la vieille fille, était du Moka le plus authentique, et, dont chaque grain valait pour le moins son poids en or. Le bois s’entassa dans les profondeurs de l’antique foyer et la cuisine s’illumina de clartés inaccoutumées, pendant que Phœbé, toujours serviable, fabriquait un gâteau de blé de Turquie, d’après une recette qui lui venait de sa mère. Parini les torrents de fumée que vomissait la cheminée mal construite, voltigeaient peut-être, dans une atmosphère bien connue d’elles, les cuisinières du temps passé lorgnant d’un œil dédaigneux ces préparatifs élémentaires, et vainement désireuses de prêter les mains, leurs mains de fantômes, à ces amalgames essayés par une adepte encore novice. Les rats, du moins, à demi morts de faim, se glissaient hors de leurs cachettes obscures, et paisiblement assis sur leur arrière-train aspiraient ces grasses émanations pleines de pressentiments et de promesses.

Hepzibah n’avait aucune disposition pour le grand art de préparer les aliments. Sa maigreur, il faut bien le dire, était due à l’aversion que lui inspiraient le mouvement rotatoire de la broche et l’ébullition monotone du pot-au-feu. Les soins qu’elle prenait ce matin-là étaient donc tout simplement héroïques, et en