Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/159

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perchés dans le poirier, que pour les anxiétés d’Hepzibah, pour les plaintes vagues de son frère.

À celui-ci surtout, « au cousin Clifford » ainsi qu’elle l’appelait maintenant, Phœbé s’était rendue particulièrement nécessaire. Non qu’à vrai dire il causât jamais avec sa cousine, ou manifestât souvent, d’aucune autre façon, le plaisir qu’il trouvait à vivre près d’elle. Mais si elle était longtemps absente, il devenait inquiet et maussade, arpentait sa chambre dans tous les sens avec cette incertitude qui caractérisait ses mouvements ; ou bien encore, enfoncé dans son grand fauteuil, la tête appuyée sur ses mains, ne donnait d’autre signe de vie qu’une étincelle électrique de mauvaise humeur, chaque fois qu’Hepzibah essayait de le ranimer. Il ne demandait au reste que la présence de Phœbé, le reflet de cette sérénité radieuse qu’elle portait toujours avec elle, son gazouillement de source vive, ses chansons d’oiseau. Tant qu’elle chantait, la jeune fille pouvait errer à son gré par la maison ou dans le jardin ; Clifford était satisfait, soit que ces airs joyeux lui vinssent ou de l’étage supérieur, ou du petit magasin, ou de derrière le poirier dont ils traversaient le feuillage en même temps que les rayons du soleil. Il restait alors paisiblement assis, sa physionomie exprimant un plaisir tranquille, tantôt un peu plus vif, tantôt légèrement atténué, selon que la chanson se rapprochait ou s’éloignait. Mais pour qu’elle le ravît complètement, il fallait que la jeune musicienne fût assise à ses pieds, sur un tabouret.

Il paraîtra peut-être singulier qu’une personne si gaie chantât volontiers des airs tristes. Les jeunes et les heureuses, cependant, aiment à tempérer ainsi,