Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/297

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cipés, un pareil tableau avait mille surprises, mille nouveautés. Et c’en était une, déjà, que de se trouver ainsi sous cette toiture étroite et longue, en société intime de cinquante êtres humains, et emportés en avant par la même irrésistible influence. Il leur semblait merveilleux que tous ces gens pussent demeurer si tranquilles sur leurs siéges, tandis qu’on dépensait pour eux tant de force et tant de bruit. Quelques-uns, le billet au chapeau (ceux-ci étaient des voyageurs au long cours, ayant devant eux trois ou quatre cent milles de rail), s’absorbaient dans la description de tel ou tel paysage anglais, suivaient les complications d’un roman à la mode, et menaient la « haute vie » avec des ducs et des comtes imaginaires. D’autres, à qui un voyage plus court ne laissait pas la marge nécessaire pour se consacrer à des études si abstraites, charmaient l’ennui de leur route en parcourant quelque journal à un sou. Plusieurs jeunes filles et un jeune homme, dispersés aux deux extrémités du wagon, s’égayaient immensément, grâce à un jeu de balle qu’ils avaient organisé. L’élastique projectile passait et repassait de tous côtés parmi des éclats de rire qu’on aurait pu mesurer au kilomètre ; car, si vite que la balle agile pût voler, les joueurs folâtres faisaient encore plus de chemin, et, sans s’en apercevoir, laissant derrière eux le sillage de leur bonne humeur bruyante, ils achevaient leur partie sous un autre ciel que celui qui l’avait vue commencer. À chaque station accouraient des enfants approvisionnés de pommes, de gâteaux, de sucreries aux couleurs diverses, qui rappelaient à Hepzibah son magasin abandonné. Il entrait sans cesse de nouvelles gens ; d’anciennes connaissances