Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/38

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dre, ne la connaissant pas, pour l’expression de quelque mauvais vouloir plein d’amertume. Rien de pareil n’existait en réalité. Ce visage peint lui inspirait une vénération dont une arrière-petite-fille, une vierge flétrie par l’âge, pouvait seule se montrer susceptible ; et ce froncement de sourcils qui semblait si peu obligeant ne tenait en définitive qu’à sa myopie, à l’effort qu’il lui fallait faire pour préciser les vagues contours de l’image qu’elle avait sous les yeux. Cette désastreuse habitude de plisser son front chaque fois qu’elle regardait attentivement quelque objet, avait joué à miss Hepzibah le tour de la faire passer pour méchante. Elle-même, en face du miroir terni où parfois elle étudiait son visage, se sentait sous la même impression que les passants lorsqu’ils la voyaient à sa fenêtre. Sa physionomie refrognée lui déplaisait comme à eux, et souvent, après s’être dit : « Que j’ai l’air grognon ! » elle dut conclure comme eux de l’expression de son visage aux défauts de son caractère. Mais son cœur, lui, n’avait pas de rides. Il était naturellement tendre, ouvert aux sensations, frémissant, palpitant au moindre sujet, et garda toujours ces faiblesses intimes, tandis que le visage de la timide Hepzibah, s’obstinant dans sa rudesse, prenait un aspect de plus en plus farouche. Je m’aperçois, cependant, qu’une couardise secrète me retient encore au seuil de mon récit. J’éprouve, s’il faut l’avouer, une répugnance invincible à révéler ce qu’allait faire miss Hepzibah Pyncheon.

Il a déjà été dit qu’au rez-de-chaussée du pignon jouxtant la rue, un ancêtre indigne avait monté un magasin, dans le courant du siècle passé. Depuis la retraite et le trépas de ce noble commerçant, on ne