Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/41

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pignon central, — le crépuscule, ici, ressemblait à la nuit pour le moins autant qu’au jour. Autre soupir de miss Hepzibah, dont la poitrine était ce jour-là un véritable antre d’Éole. Arrêtée un moment sur le seuil, et jetant vers la fenêtre du magasin un de ces regards myopes auxquels ses sourcils froncés donnaient l’expression de la haine, elle entra ou plutôt elle se jeta dans la boutique par un mouvement brusque, inquiétant, tel en un mot qu’aurait pu l’imprimer à son corps une décharge de la pile voltaïque. Avec des mouvements nerveux, une espèce de fièvre, pourrions-nous dire, elle se mit à étaler, sur les rayons et derrière les vitrages de la fenêtre, quelques jouets d’enfants et autres menus objets de mercerie. L’aspect général de cette femme âgée, aux belles manières, aux noirs vêtements, au pâle visage, avait quelque chose de profondément tragique, bien difficile à concilier avec la mesquinerie presque risible de l’occupation qu’elle se donnait. C’était une flagrante anomalie que de voir une personne si solennelle et si mélancolique avec un jouet à la main ; c’était un miracle que, dans l’étreinte du fantôme, le jouet ne s’évanouît pas ; c’était enfin une idée absurde que la préoccupation où s’absorbait son intelligence dépourvue de souplesse et de sérénité, en cherchant les séductions qui pourraient attirer l’enfance autour d’elle. Et cependant, elle visait à rendre sa boutique attrayante pour les gamins de la ville. Mais ses mains tremblantes, tantôt laissaient échapper un éléphant de pain d’épices qui, tombant à ses pieds, perdait sa trompe et trois jambes ; tantôt renversaient un panier de billes qui s’éparpillaient dans l’obscurité comme autant de lutins invisibles. Hélas ! gardons-nous de