Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/43

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l’origine se perd dans la nuit des temps, — qui compte deux cents ans de noblesse sur le Nouveau continent et peut-être trois fois autant de l’autre côté de l’eau ; — il faut nous rappeler ses arbres généalogiques, ses portraits d’ancêtres, ses écussons, ses traditions de famille et ses droits éventuels, comme cohéritière, sur cette principauté d’Orient qui n’est plus un désert sauvage, mais un vaste pays populeux et en pleine culture ; — il faut nous rappeler qu’elle est née dans Pyncheon-street, à l’ombre de l’Orme-Pyncheon, dans cette Pyncheon-House qu’elle n’a jamais quittée, — et c’est dans cette maison même, résidence héréditaire de ses ancêtres, qu’elle va installer une misérable vente au détail ! Dans une situation comme celle de notre pauvre recluse, les femmes n’ont guère d’autres ressources. Celle-ci, avec sa myopie, le tremblement nerveux de ses mains, ne pourrait se livrer à un travail de couture, bien que sa collection de patrons, âgée d’un demi-siècle, témoignât qu’elle avait abordé jadis les broderies les plus compliquées. Souvent elle avait pensé à monter une école de marmots et passé en revue ses anciennes études élémentaires pour se préparer au rôle d’institutrice. Mais l’amour des enfants n’avait jamais pris racine dans le cœur de la vieille fille ; il y était profondément engourdi sinon tout à fait éteint ; et quand elle regardait, de sa fenêtre, ces petits êtres incommodes et bruyants, elle ne se sentait aucune envie d’établir avec eux des rapports plus intimes. En notre temps, d’ailleurs, l’A B C lui-même s’est grandi aux proportions d’une science beaucoup trop abstraite pour qu’on l’enseigne en promenant une épingle d’une lettre à l’autre. Un enfant, de nos jours,