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baissée, sans même avoir la précaution d’ôter ses chaussures.

« Pouf ! pouf ! pouf ! s’en allait-il soufflant, en sortant la tête de l’eau. Voici un bain d’une fraîcheur délicieuse ; j’espère qu’il m’aura tout à fait débarrassé du toucher d’or. » Et il se hâta d’emplir son vase.

En le plongeant dans l’eau, son cœur battit de plaisir à voir ce bon et honnête vase d’argile se métamorphoser derechef et recouvrer sa nature primitive. Midas avait conscience en outre qu’un changement s’était opéré en lui-même ; sa poitrine se dégageait d’un poids écrasant et glacial. Sans nul doute, son cœur avait petit à petit perdu sa substance humaine, et s’était transmué en un organe insensible et métallique ; mais évidemment il se ramollissait et s’adoucissait comme un vrai cœur de chair. Apercevant une violette sur le rivage, Midas la toucha du doigt, et fut au comble de la joie en s’assurant que la délicate petite fleur avait conservé sa nuance naturelle, au lieu de se teindre en jaune, brillant, il est vrai, mais couleur de feuille morte. Le maudit toucher d’or lui était donc bien positivement enlevé.

Le roi Midas rentra bien vite au palais. Je suppose que les domestiques étaient tout ébahis à la vue de leur royal maître apportant avec tant de soin une simple cruche d’eau. Mais cette eau, qui devait réparer tout le mal causé par l’extravagance