Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, première partie, trad. Rabillon, 1858.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
60

son affection, serait de lui léguer le plus possible de cette monnaie jaune et brillante, qu’on a toujours entassée depuis le commencement du monde.

Toutes ses pensées, tout son temps, étaient consacrés à ce projet. S’il lui arrivait d’arrêter son regard sur les nuages dorés d’un coucher de soleil, il aurait voulu pouvoir les saisir, les changer en or pur et les enfermer dans ses coffres. Quand la petite Marie-d’Or courait à sa rencontre avec une touffe de genêts ou des boutons-d’or, il disait aussitôt : «. Bah ! bah mon enfant, si ces fleurs étaient du métal dont elles ont la couleur, elles vaudraient la peine de les cueillir !»

Pourtant, dans sa première jeunesse, avant d’être possédé d’une passion aussi extravagante, le roi Midas avait montré un goût décidé pour les fleurs. Il avait planté un jardin où poussaient les roses les plus belles et les plus suaves qui eussent jamais réjoui l’odorat ou les yeux d’aucun mortel. Ces roses étalaient bien encore des corolles aussi fraîches et aussi embaumées qu’à l’époque où Midas passait des heures entières à en aspirer le parfum ; mais aujourd’hui, s’il les regardait, c’était seulement pour calculer quelle en serait la valeur, dans le cas où ces innombrables pétales seraient autant de petites plaques d’or ; et, malgré sa passion d’autrefois pour la musique (en dépit d’une vieille histoire sur ses oreilles, taillées, disait-on, sur le modèle de