Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/182

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épaules. » Au lieu de satisfaire à leurs désirs, Ulysse assembla ses hommes autour de lui, et leur dit qu’en vain ils espéraient lui voir tuer tous les jours un pareil gibier pour leur dîner. La raison exigeait qu’ils se procurassent d’autres ressources pour apaiser leur faim.

« Maintenant, dit-il, vous saurez que, lorsque j’étais hier au haut de la falaise, je découvris que l’île est habitée. À une distance considérable du rivage s’élève un palais de marbre qui paraît fort spacieux, et de l’une des cheminées s’échappaient des tourbillons de fumée.

— Ah ! ah ! murmurèrent ses auditeurs intéressés par ce récit, en faisant claquer leurs lèvres. Cette fumée devait venir du feu de la cuisine. Devant le foyer tournait une broche richement garnie, et sans nul doute le dîner d’aujourd’hui s’annonce au moins aussi bien que celui d’hier.

— Mes bons amis, continua le sage orateur, souvenez-vous de notre mésaventure dans la caverne de Polyphème, le cyclope à l’œil unique ! Au lieu du lait qui composait ordinairement son repas du soir, n’a-t-il pas mangé une couple de nos camarades, puis deux autres à son déjeuner, puis le même nombre au souper suivant ? Il me semble encore le voir, cet être hideux, avec son grand œil rond au milieu du front, nous examiner minutieusement pour distinguer le plus gras de notre bande. Quel-