Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien qu’elle avait commis de crimes, malgré le peu de goût qu’elle pouvait prendre à cet exercice nouveau pour elle. Elle conduisit Ulysse hors du palais et lui montra les pourceaux entassés dans l’étable. Il y en avait environ une cinquantaine. Quoique la majorité du troupeau fût composée de porcs de naissance et d’éducation, il était presque impossible de distinguer ceux-ci de leurs frères métamorphosés tout récemment, tant la différence qui existait entre eux échappait à l’œil le plus merveilleusement clairvoyant. Pour parler d’une façon rigoureuse, les derniers portaient plutôt à l’excès les instincts grossiers de leur nature, se vautraient dans les endroits les plus impurs de l’étable, et paraisssaient s’efforcer de lutter de saleté avec leurs aînés. Quand l’homme en arrive à un certain point de dégradation, le peu d’intelligence qui lui reste n’a d’autre effet que de décupler sa brutalité.

Malgré leur honteuse métamorphose, les compagnons d’Ulysse n’avaient pourtant pas entièrement oublié que jadis ils s’étaient tenus debout comme des humains. Lorsque Ulysse approcha de l’étable, vingt-deux énormes porcs se détachèrent du troupeau, en fendant l’air de si horribles cris, que le héros fut obligé d’appliquer ses deux mains à ses oreilles. Ils ne paraissaient pas avoir conscience de ce qu’ils voulaient ; l’instinct ne leur révélait même