Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/288

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tait immédiatement, celui-ci deviendrait encore plus sec et tout à fait impossible à manger.

« Au moins je peux le sentir, » pensa l’imprudente.

Elle prit la grenade et la porta à son nez. On ne sait comment cela se fit, mais, se trouvant si près de la bouche, le fruit s’y fraya bientôt un passage. Acte à jamais regrettable ! Sans savoir ce qu’elle faisait, Proserpine mordit les graines fatales à belles dents. Précisément à l’instant où cela se passait, la porte de l’appartement s’ouvrit et le roi Pluton parut, suivi de Vif-Argent qui avait vivement plaidé pour la délivrance de la captive. Au premier bruit de leur entrée, l’enfant avait retiré la grenade de sa bouche ; mais le rusé visiteur, dont le coup d’œil était aussi pénétrant que l’esprit, devina, à la confusion de sa protégée et à la vue du plateau, qu’elle avait goûté à quelque chose. Quant à l’honnête Pluton, il ne conçut aucun soupçon.

« Ma chère petite Proserpine, dit le souverain de ces lieux, en prenant un siège et en l’attirant affectueusement entre ses genoux, vous voyez ici Vif-Argent, qui m’apprend les grands malheurs arrivés à de nombreux innocents. Je suis accusé de causer leur détresse en vous retenant dans mon royaume. J’avouerai la vérité. J’ai déjà réfléchi que c’était de ma part un acte injustifiable de vous enlever à votre bonne mère. Mais aussi vous devez considé-