Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/37

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soudre au sujet de l’inconnu, cette femme horrible eut une réponse toute prête.

« Que Votre Majesté me laisse le soin de cette affaire, répliqua-t-elle. Admettez en votre présence ce jeune homme aux sinistres projets, traitez-le avec bienveillance et l’invitez à boire une coupe de vin. Votre Majesté n’ignore pas que je m’amuse parfois à distiller des essences d’une grande vertu. Cette petite fiole renferme un mélange que j’ai composé moi-même et dont je connais seule le secret. Permettez-moi d’en verser une seule goutte dans la coupe, et, s’il la porte à ses lèvres, je vous réponds qu’il aura bientôt perdu toute idée de mettre à exécution ses horribles complots. »

Médée accompagna ces paroles d’un sourire ; mais, tout en affectant un air gracieux, elle ne se préparait à rien moins qu’à empoisonner Thésée devant les yeux de son père. Le roi Égée, semblable à la plupart des rois, se souciait peu que le châtiment fût doux ou rigoureux, quand il tombait sur un homme accusé de conspirer contre son existence : aussi ne fit-il pas d’objections. Il ordonna d’introduire l’étranger sans plus de retard. La coupe fut placée sur une table, à côté du trône ; et une mouche, s’étant avisée d’en venir sucer les bords, tomba morte immédiatement dans la liqueur. Médée, d’un regard, fit observer cette circonstance aux neveux, et sourit de nouveau avec complaisance.