Page:Hawthorne - Le Livre des merveilles, seconde partie, trad. Rabillon, 1882.djvu/92

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Là, se penchant sur les bords de cette profonde cavité, il lui cria de toutes ses forces :

« Holà ! ho ! frère Antée ! Lève-toi sur-le-champ, et prends bien vite ton grand bâton. Voilà un autre géant qui vient pour te chercher querelle.

— Oh ! bah ! murmura-t-il, à moitié éveillé. Ne vois-tu pas que j’ai envie de dormir ? Il n’existe pas sur terre de géant pour lequel je voulusse me déranger. »

Mais le Pygmée donna un dernier coup d’œil, et aperçut clairement l’étranger qui dirigeait ses pas vers l’indolent colosse. Plus il avançait, moins son aspect affectait l’apparence d’une montagne. C’était évidemment un homme, mais de proportions immenses. Il fut bientôt si près, qu’aucune méprise n’était plus possible. Le soleil dardait ses rayons sur son casque d’or, et de sa cuirasse jaillissaient des traits de lumière. On le distinguait parfaitement avec un glaive au côté, sur le dos une peau de lion, et sur l’épaule droite une massue plus énorme et plus pesante, au dire des spectateurs, que le bâton d’Antée, formé d’un sapin entier.

En un moment tout le peuple avait pu contempler la nouvelle merveille, et un million d’individus s’étaient levés comme un seul homme en poussant à la fois une seule acclamation, de manière que la masse de ces petits cris réunis produisit un bruit véritablement perceptible.