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tout entière fût consumée. Et on se souvient encore à Tokyô de cette calamité qui se produisit le dix-huitième jour du premier mois de la première année de Meiréki (1655), — et on l’appelle le Furisodé-Kwaji, ou le Grand Incendie de la Robe aux Longues Manches.

Suivant un livre d’histoire appelé le Kibun-Daijin, la jeune fille qui fit faire la robe s’appelait O-Samé. Elle était la fille de Hikoyémon, négociant en vins de Hyakushô-machi, dans le quartier d’Azabu. Et à cause de sa beauté on l’appelait aussi Azabu-Komachi, ou la Komachi d’Azabu[1]. Le même livre dit que le temple de la légende était un temple de la secte Nichiren appelé

  1. Après plus de mille ans, le nom de Komachi, ou Ono-no-Komachi, est encore célèbre au Japon. C’était la plus belle fille de son époque, et une poétesse remarquable : elle savait émouvoir le ciel avec ses poèmes, et faire tomber la pluie en temps de sécheresse. Beaucoup d’hommes l’aimèrent en vain, et beaucoup moururent d’amour d’elle. Mais les malheurs s’abattirent sur elle avec l’âge : alors, étant réduite à la plus abjecte pauvreté, elle se fit mendiante et mourut enfin sur la grande route, près de Kyôto. Comme on estima qu’il serait honteux de l’enterrer avec ses guenilles, une pauvresse lui donna une vieille robe d’été (katabira) pour lui servir de linceul. Elle fut enterrée à Arashyama dans un endroit que l’on appelle encore « l’Endroit de la Katabira » (Katabira-no-Tsuchi).