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Ces chers Westphaliens, avec qui j’ai si souvent bu à Gœttingue, jusqu’à ce qu’une douce émotion gagnât notre cœur, et que nous nous embrassions tendrement, et que nous tombions tendrement sous la table.

Je les ai toujours aimés, ces chers, ces bons Westphaliens, ce peuple si fort, si sûr, si loyal, sans vanterie, sans jactance.

Comme ils étaient beaux sur le terrain d’un duel, avec leur cœur de lion ! Les quartes et les tierces de leur rapière, comme elles tombaient droites et franches !

Ils se battent bien, ils boivent bien, et quand ils vous tendent la main, en témoignage d’amitié, ils se mettent à pleurer ; — ce sont des chênes sentimentaux.

Que le ciel te conserve, brave peuple ; qu’il bénisse tes moissons, qu’il te préserve de la guerre et de la gloire, des héros et de leurs exploits héroïques ;

Qu’il accorde toujours à tes fils de faciles examens, et qu’il marie bien tes filles. — Amen !


11

Voici la forêt de Teutobourg, dont Tacite a fait la description. — C’est là le marais classique où Varus est resté.

C’est là que se battit le prince des Chérusques, Hermann, la noble épée ; la nationalité allemande a vaincu sur ce terrain boueux, dans cette crotte où s’enfoncèrent les légions de Rome.

Si Hermann n’eût pas gagné la bataille avec ses hordes blondes, il n’y aurait plus de liberté allemande ; nous serions devenus Romains.

Dans notre patrie régneraient maintenant la langue et les coutumes de Rome. Il y aurait des Vestales même à Munich ; les Souabes s’appelleraient Quirites.

Hengstenberg serait un aruspice et fouillerait dans les entrailles des taureaux ; Neander serait un augure et considérerait, son nez au vent, le vol des oiseaux de Berlin.