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Êtes-vous chez les oiselets d’or qui, vêtus de clarté, s’ébattent là-haut dans l’air bleu ?

Êtes-vous chez les petites étoiles d’or qui, dans un fourmillement lumineux, sourient au ciel toutes les nuits ?

Hélas ! mes ducats d’or, vous ne nagez pas dans les flots du ruisseau, vous n’étincelez pas sur la verte pelouse, vous ne planez pas dans l’air bleu, vous ne souriez pas au ciel clair. — Ce sont, ma foi ! les usuriers qui vous tiennent dans leurs griffes.


18
DIALOGUE SUR LA
LANDE DE PADERBORN

N’entends-tu pas des airs lointains, des airs de violon et de violoncelle ? Ce sont, sans doute, quelques belles qui dansent légèrement la ronde ailée.

— « Eh ! mon ami, tu fais erreur. Je n’entends pas le moindre violon, mais seulement des gorets qui crient et des cochons qui grognent. »

N’entends-tu pas le cor au fond des bois ? Ce sont des chasseurs contents de leur chasse ; je vois de doux agneaux qui paissent, des pâtres qui jouent du chalumeau.

— « Eh ! mon ami, ce que tu entends, ce n’est ni cor ni chalumeau ; je ne vois que le porcher qui pousse ses truies vers l’étable. »

N’entends-tu pas des chants lointains, doux comme ceux des bucoliques ? Les petits anges avec leurs ailes applaudissent à de tel accents.

— « Eh ! ce qui tant joliment résonne, ce n’est pas un air alterné, mon ami ! Ce sont des gamins qui chantent, en poussant devant eux leurs oisons. »

N’entends-tu pas tinter les cloches, douces et claires merveilleusement ? Vers la chapelle du village, les fidèles dirigent leurs pas en un dévot recueillement.