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Page:Hello-Les Plateaux de la balance, Perrin, 1923.djvu/171

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tablement l’air d’être absorbé dans cette chose. Un homme aspirait au pouvoir : son ambition semblait véritablement aller jusqu’au pouvoir et se terminer à lui. On pouvait espérer pour lui le repos, dès qu’il sérail arrivé au terme de ses désirs, parce que les désirs semblaient avoir un terme.

Les nôtres avouent qu’ils n’en ont pas, et qu’ils ne cesseront de nous dévorer que quand ils auront l’infini pour pâture.

Mais pour jeter définitivement son dévolu sur l’infini, il faut du courage, : car alors, dans la théorie et dans la pratique, le sacrifice intervient. Il ne suffit plus d’être ardent, il faut être fort. L’aspiration n’est pas la condition unique : la vertu devient nécessaire. Pour adorer l’infini, et l’adorer tel qu’il est, là où il est, l’homme a besoin d’être juste.

Or, étant ardent et étant faible, plein de désirs, et vide de vertus, qu’a fait l’homme ? Il a choisi telle ou telle créature et a taché de l’adorer ; mais, comme il ne veut plus restreindre ses prétentions, il a exigé de la créature adorée, qu’elle fût on qu’elle parût infinie. Au dix-septième siècle, elle n’était tenue qu’à être aimable ; au dix-neuvième siècle, il faut qu’elle soit infinie.

Voilà le caractère de notre société et de notre littérature : c’est une passion grande dans sa source, égarée dans son objet, qui crève et dévore les choses qu’elle touche.

Les jeunes premiers de Molière trouvent charmantes les jeunes premières que l’au-