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Page:Hello-Les Plateaux de la balance, Perrin, 1923.djvu/293

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de Gœthe, j’ai rencontré ce mot et le voici : Isolement.

Sa vie, telle qu’elle fut, réalisa l’isolement. Sa vie, telle qu’elle devait être, qu’eût-elle pu réaliser ?

La paix.

Car l’homme qui tombe, tombe dans la direction qu’il devait suivre pour monter.

L’abîme qui menace chaque homme ressemble par sa forme et sa nature, à la hauteur qui attend ce même homme, s’il veut monter.

Notre chute a la forme renversée de notre grandeur possible.

Le genre de mal que nous faisons est la parodie directe du genre de bien que nous étions appelés à faire.

Or l’isolement est la parodie de la paix.

La paix domine ; l’isolement sépare.

La paix enferme l’homme dans le domaine tranquille de l’Être ; l’isolement enferme l’homme dans le domaine mort du néant. Gœthe n’était encadré dans aucune école : il promenait de tous côtés un regard investigateur et détaché qui scrutait les choses sans entrer dans leur dépendance ; il restait au dehors pour regarder au dedans.

Il n’était pas emporté comme Alfred de Musset ou lord Byron par un mouvement rapide et accidentel ; il ne vivait pas au jour le jour. Non ; il regardait vivre le genre humain comme on assiste à un spectacle. S’il avait connu le sens du grand drame, il l’eût contemplé dans la paix, en le rapportant à Dieu.