Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 1.djvu/223

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n’est jamais que sentir. Mais, dira-t-on, supposons qu’on veuille savoir si la force est préférable à la grandeur du corps, peut-on assurer qu’alors juger soit sentir ? Oui, répondrai-je : car, pour porter un jugement sur ce sujet, ma mémoire doit me tracer successivement les tableaux des situations différentes où je puis me trouver le plus communément dans le cours de ma vie. Or juger, c’est voir dans ces divers tableaux que la force me sera plus souvent utile que la grandeur du corps. Mais, répliquera-t-on, lorsqu’il s’agit de juger si dans un roi la justice est préférable à la bonté, peut-on imaginer qu’un jugement ne soit alors qu’une sensation ?

Cette opinion sans doute a d’abord l’air d’un paradoxe : cependant, pour en prouver la vérité, supposons dans un homme la connoissance de ce qu’on