Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 2.djvu/62

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Mais, ajoutera-t-on, comment imaginer qu’un homme qui, par exemple, remplit les petits offices de la magistrature puisse se croire autant d’esprit que Corneille ? Il est vrai, répondrai-je, qu’il ne mettra personne à cet égard dans sa confidence. Cependant, lorsque, par un examen scrupuleux, l’on a découvert de combien de sentiments d’orgueil nous sommes journellement affectés sans nous en appercevoir, et par combien d’éloges il faut être enhardi pour s’avouer à soi-même et aux autres la profonde estime qu’on a pour son esprit, on sent que le silence de l’orgueil n’en prouve point l’absence. Supposons, pour suivre l’exemple ci-dessus rapporté, qu’au sortir de la comédie le hasard rassemble trois praticiens ; qu’ils viennent à parler de Corneille : tous trois, peut-être, s’écrieront à-la-fois que Corneille est le plus