Page:Henri IV - Lettres Missives - Tome1.djvu/463

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royent prendre, d’en faire de mesme, soubz l’esperance d’en estre quictes par argent : qui seroit entretenir le mal, au lieu de le destruire. Par quoy, mon Cousin, j’aime mieulx que le traicté entre nous faict soyt rompu, que de rien prendre de ceste somme avec telles et si pernicieuses conditions. Ce que je vous prie faire entendre à Sa dicte Majesté et le plus tost que faire se pourra. Ce pendant et en attendant sa volonté et intention sur ce, je ne lairray pas de continuer les effectz de ma bonne affection en tout ce qui dépendra de moy pour l’execution du dict edict ; et vous prie bien fort d’en faire de mesme, et incontinent qu’aurez presenté et faict lire et publier vostre dict pouvoir en la dicte court, vous en revenir, sans pour ce attendre monsr de Bellievre ; car je me doubte bien qu’il ne s’en reviendra si tost, pour le desir qu’il a de se trouver aux Estatz de Languedoc ; et n’y a rien qui apporte tant de prejudice en ceste negociation que la longueur et dilation du temps, pour rompre mesmement des menées et praticques que j’ay entendu qui se font, comme le sr de Frontenac[1], que je vous despescheray demain, vous fera entendre plus amplement. Qui est cause que je prie bien fort le dict sr de Bellievre, comme faict aussi ma femme, de s’en revenir pour vous ayder à parachever le bon œuvre qu’avez commencé, duquel je desire aultant que personne du monde un bon et heureux succez pour le contentement de Sa Majesté et le bien et repos de son Royaulme. En quoy je prie Dieu vous assister, et vous donner, mon Cousin, sa trez saincte grace. Escript à Nerac, ce premier jour de decembre 1581.

Vostre bien affectionné cousin et parfaict amy,


HENRY.
  1. M. de Frontenac était écuyer ordinaire de la petite écurie du roi de Navarre, et plus tard remplaça M. de Lons comme premier écuyer. La plupart des états de la dépense de ce service sont signés de Frontenac ou de d’Aubigné, qui avait la même charge d’écuyer ordinaire. Mais Frontenac jouissait de la confiance la plus intime du prince, dont il partageait le lit, comme nous l’apprend d’Aubigné dans ses Mémoires. On verra plus tard Henri IV en parler à Marie de Médicis comme d’un autre lui-même.