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Monseigneur, en parfaicte santé, tres longuement et tres heureusement.

De .....

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[HENRY.]



1584. — 3 juillet.

Orig. — Arch. de M. d’Andurrain, de Mauléon. Copie transmise par M. Jubé, sous-chef de bureau au ministère de l’Instruction publique.


À MONSR DE PERUL,

ALCADE DE MON PAYS DE CIZE[1].

Monsr de Perul, Ayant monsr le duc d’Espernon[2] desliberé de me venir veoir en ce lieu, je desire le y recepvoir avec toute la demons-

  1. Le pays ou la vallée de Cize, en basse Navarre, a pour capitale Saint-Jean-Pied-de-Port. Il fait aujourd’hui partie de l’arrondissement de Mauléon, dans le département des Basses-Pyrénées.
  2. Jean-Louis de Nogaret et de la Valette, d’une famille de Toulouse, fils de Jean de Nogaret, seigneur de la Valette, et de Jeanne de Saint-Lari, naquit au mois de mai 1554, et mourut le 13 janvier 1642, un an avant l’avénement de Louis XIV, après avoir joué le plus grand rôle sous les règnes de Henri III, de Henri IV et de Louis XIII. Il s’était d’abord attaché au roi de Navarre, dans les années qui suivirent la Saint-Barthélemy ; mais, après avoir accompagné ce prince dans sa fuite de la cour, en 1576, il ne tarda pas à le quitter, et parvint à égaler le duc de Joyeuse dans la faveur la plus intime de Henri III. Ce prince ne mit pas de bornes dans la prodigalité des biens et des honneurs dont il les combla ; jusqu’à vouloir partager avec eux son royaume. La Valette eut la terre de son nom érigée en marquisat, devint duc d’Épernon, pair de France, comte de Montfort et d’Astarac, chevalier des ordres, premier gentilhomme de la chambre, colonel général de l’infanterie francaise, amiral de France : le Journal de l’Estoile le surnomme l’archi-mignon. Le Roi, qui avait fait épouser à Joyeuse la sœur de la reine sa femme, voulait marier d’Épernon à madame Catherine, sœur du roi de Navarre, ce qui blessa profondément ce prince. Néanmoins la toute-puissance d’un tel favori ne pouvait être ni méconnue ni dédaignée. Et, lorsqu’au moment de la mort du duc d’Alençon, d’Épernon fut envoyé au roi de Navarre avec une mission toute bienveillante, ce prince lui fit l’accueil le plus gracieux et le plus empressé. Le duc d’Épernon était parti le 15 mai, près d’un mois avant la mort du duc d’Alençon. Mais déjà l’état de Monsieur était complétement désespéré, et il n’était question à la cour que des combinaisons qu’allait amener sa mort. Du Plessis-Mornay, en mission auprès de Henri III, écrivait au roi de Navarre, dès le mois d’avril : « Sa Majesté mesme, parlant de vous à nous, ne feint point de dire que vous estes aujourd’hui la seconde personne de France..... Ces jours passés aussi Sa Majesté après son disner, estant devant le feu, M. du Maine present et grand nombre de gentilshommes, aprés un long discours de la maladie de Son Altesse, dit ces mots : « Aujourd’hui je recognois le roi de Navarre pour mon seul et unique heritier. C’est un prince bien né et de bon naturel. Mon naturel a tousjours esté de l’aimer, et je sçai qu’il m’aime. Il est un peu cholere et piquant, mais le fonds en est bon. »