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qu’une connaissance fragmentaire. Nous trouverions toujours bien moyen de raccorder ces deux fragments même s’ils étaient restés intacts ; à plus forte raison s’il ne nous reste du plus ancien qu’une image affaiblie, incertaine et à demi effacée.

VII

Plaçons-nous maintenant à un autre point de vue. Les lois que nous donne l’observation directe ne sont jamais que des résultantes. Prenons par exemple la loi de Mariotte. Pour la plupart des physiciens, ce n’est qu’une conséquence de la théorie cinétique des gaz ; les molécules gazeuses sont animées de vitesses considérables, elles décrivent des trajectoires compliquées dont on pourrait écrire l’équation exacte si l’on savait suivant quelles lois elles s’attirent ou se repoussent mutuellement. En raisonnant sur ces trajectoires d’après les règles du calcul des probabilités, on arrive à démontrer que la densité d’un gaz est proportionnelle à sa pression.

Les lois qui régissent les corps observables ne seraient donc que des conséquences des lois moléculaires.

Leur simplicité ne serait qu’apparente et cacherait une réalité extrêmement complexe puisque la complexité en serait mesurée par le nombre même