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de l’abbaye de pontigny.

nacée de voir ses voûtes crouler et ses colonnes tomber dans la poussière.

Le voyageur qui parcourt ces lieux, autrefois si florissans et si animés par le concours des chrétiens, sent son âme partagée entre le respect, la tristesse et l’effroi. S’il porte ses pas autour de l’église, il ne voit que des ruines ; s’il pénètre dans la basilique, il voit, dans le silence de ce vaste édifice, le salpêtre et la mousse couvrir le sol des chapelles et le pied des murs ; il voit les autels, qui rappellent le sublime sacrifice du Sauveur, renversés ou demi-ruinés, les tableaux déplacés, les lambris qui se dégradent, les vitraux entr’ouverts, et au milieu de ces dépérissemens, il remarque des restes magnifiques qui attestent la foi et la grandeur d’àme des enfans de saint Étienne. Le corps de saint Edme occupe toujours son ancienne place, mais on ne voit aucune lampe devant la châsse du saint archevêque, aucun cierge qui répande sous les arceaux une lueur pieuse et recueillie. Cette terre de bénédiction, l’asile de la piété de nos pères, possède à peine un prêtre pour célébrer sur les tombeaux de ces hommes qui ont si bien mérité de la société toute entière. S’il faut tout dire sur les ruines de cette noble fille de Cîteaux, qui avait apporté en dot à nos pays l’Évangile et la civilisation, sur cette terre sacrée où reposa saint Edme, saint Thomas de Cantorbéry, saint Louis, et tant d’autres, un nouveau propriétaire éleva, en 1793, une chapelle et une statue à l’impudique Vénus, et sur le seuil, deux autres statues dignes de la déesse. La statue a été enlevée en 1814, et les peintures qui l’environnaient effacées.