Page:Henry - Le Père Lachaise historique, monumental et biographique.djvu/113

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A peine âgé de dix-sept ans, NODIER écrivit une mie qui respirait trop haut pour la liberté du temps. C’était sous le Consulat : Napoléon, qui s’essayait à comprimer sous son pied les battements du cœur de la France, et qui haïssait la pensée, parcequ’elle est la liberté de l’âme, fit bâillonner par sa police cette voix dont l’accent mâle pouvait faire vibrer les cordes graves du cœur humain. Malgré cette oppression, les autres écrits que Nodier publia à la même époque laissent transpirer les flammes du cœur, les enthousiasmes de l’esprit, les aspirations de la liberté et la haine de l’abrutissement.

Sur le même point nous trouvons, à droite, entre les sépultures Travers et Bazin, la modeste pierre qui recouvre les restes de BALZAC (207).

Honoré DE BALZAC fut l’un des plus profonds penseurs du seizième siècle et des plus féconds romanciers de tous les pays et de tous les âges. Conteur agréable, écrivain plein d’élégance et d’une éternel je verdeur, ses ouvrages trouveront toujours des lecteurs, parcequ’ils intéressent par nue grande variété d’idées, aussi piquantes de naturel que profondes de philosophie.

Ensuite nous rencontrons à gauche le monument de Casimir DELAVIGNE (211).

Ce grand poète, l’un des plus beaux fleurons de la couronne littéraire de la France, était de ces hommes qui portent leur royauté en eux, et n’ont de génie que la plume à la main. Il fut le premier poète dramatique de son époque, et semblait en demander pardon à tout le monde. Il ne séduisait pas, surtout au premier abord. Sa tête était remplie d’idées, mais son discours était sobre de unis, et ne flattait jamais l’oreille ; l’harmonie était ailleurs que dans l’expression ! La vie de ces hommes de génie n’est qu’une suite de leurres et de dégoûts. Ils se forgent une félicité surhumaine que chaque jour déçoit ou renverse ; ils voient par delà les deux, et sont cloués à la terre ; ils rêvent des anges, et ne rencontrent que… des déceptions. Qui ne se rappelle la mélodie de cette douce ballade que Casimir de Delavigne ne jugea pas digne de figurer dans ses œuvres ?

La brigantine,
Qui va tourner,