Page:Henry - Les Littératures de l’Inde.djvu/292

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semble du premier coup l’avoir porté à la perfection, en marquer toul à la fois le début et l’apogée.

Nulle part mieux qu’en ce domaine n’apparait l’impossibilité, pour une histoire littéraire de l’Inde, de séparer la prose de la poésie, la littérature sanscrite de la littérature prâcrite : tous les drames sont en prose et vers, et presque tous sont bilingues, ou même plus exactement, polyglottes. Aucun 1 n’est tout entier en sanscrit, sauf tel monologue, ou les idylles dramatiques du genre du Gîta-Gôvinda (p. 218 . Au contraire, les pièces écrite- exclusivement en prâcrit ont pu être fort nombreuses ; mais il s’en est peu conservé, ce qui s’explique sans peine par leur infériorité relative- En général, voici comment se répartissent les langages dans l’œuvre scénique : les rois, les ministres, les grands personnages, les brahmanes, sauf toutefois le prêtre bouffon dont il va être question, — parlent le sanscrit ; les simples bourgeois, à plus forte raison les artisans, les goujats et les valets, et toutes les femmes, y compris les reines, et à la seule exception

dons de ces vieux poètes que quelques stances éparses et suspectes. En voici une de Bhâsa (citée S. Lévi, p. 159), dont on goûtera la grâce pittoresque : « Si les rayons de la lune donnent sur une écuelle, le chat les prend pour du lait et les lèche ; s’ils s’attachent au creux d’un arbre, l’éléphant croit voir une racine de lotus : s’ils tombent sur le lit des amants, la femme les saisit en disant « c’est ma tunique » : enivrée de sa splendeur, la lune, ô merveille ! égare tout le monde. »

1. Cf. pourtant plus bas, p. 292.